… commence le 9 Septembre 1892, jour de sa naissance à Turin, Piazza Madre di Dio, au numéro 5.
Son père, Felice Brunatto, a été l’un des plus anciens et célèbres pénitents et bienfaiteurs de Don Bosco. Emanuele, extraverti et éclectique, a toujours été une cause de grande inquiétude pour ses parents, si bien qu’en 1911, alors qu’il vient tout juste de terminer l’enseignement supérieur chez les Salésiens* et à peine majeur, il épouse une femme plus âgée que lui d’une dizaine d’années (Emma Starone, fille de feus Luigi et Giovanna Talia – Torino 20/5/1883 – Chiavari 14/10/1962) et dont les frères expiaient une longue peine d’emprisonnement pour crimes contre la propriété en Allemagne.
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(*)De son passage chez les Salésiens, il gardera l’habitude de la récitation de trois Avé avant de dormir. Il y resta fidèle, même dans les périodes les plus noires de sa vie.
L’écart d’âge entre les deux, ajouté à la droiture morale discutable de cette femme, déclencha un grand scandale dans la société bigote de l’époque, à Turin, résidence du roi et capitale du Royaume : nous sommes désormais dans le troisième millénaire, et le fait produirait toujours aujourd’hui une certaine inquiétude à plus d’un parent.
En 1914, Emanuele est un interventionniste actif et l’année d’après, il participe à la Grande Guerre dans les rangs d’une Compagnie de services, mobilisé à titre de réserve dans l’Intendance militaire (Bureau central des parcs et bestiaux), avec la tâche d’organiser l’approvisionnement et à la récupération des denrées alimentaires – et de toute autres choses nécessaires – pour le soutien matériel des troupes italiennes au front.
Poussé par son caractère et un sens certain de l’organisation, soutenu par son commandant de compagnie, il organise les services à la satisfaction de tous et ferme les yeux sur les complicités et les fraudes. Durant cette période, il mène une vie confortable, entourée de quelques femmes.
L’arrivé des premiers blessés en provenance du front le fis se porter volontaire pour servir dans une formation combattante, mais, trop utile dans son unité, sa demande n’aboutira jamais.
Vie trop confortable et avec trop de femmes, il déclenche d’abord l’envie, puis les soupçons de ses supérieurs, qui lancent ainsi une enquête après une dénonciation anonyme.
Mis aux arrêts, il confesse, au cours d’un interrogatoire par les autorités militaires supérieures, le trafic de marchandises à destination du marché noir, en essayant de disculper son commandant, qui entre-temps a sombré dans une grave crise dépressive.
Cela lui vaut un transfert immédiat au front, en première ligne, auprès d’une compagnie de produits de boulangers du Régiment Royal Italien, d’où il peut assister aux atrocités de cet immense carnage que fut la Première Guerre mondiale.
Quelques mois après son transfert, son ancien capitaine se suicide de honte à cause du scandale déclenché par l’enquête. Une période dure pour Emanuele, à qui fut aussi refusée l’autorisation de se rendre chez lui, au moment de la mort de son père (1917).
Très affecté par la mort de son père, il confesse ses fautes dans la chapelle d’un hôpital miliaire et décide de reprendre le droit chemin. Réformé pour « sténose mitrale », la guerre est terminée pour Emanuele. De retour chez sa mère à Turin, et afin de s’en sortir financièrement, il se lance dans le secteur du commerce de bois pour la construction d’abord, puis comme fabricant d’engrais et d’engrais pour l’agriculture. Il gagne alors beaucoup d’argent ce qui le fait replonger dans son habituelle vie désordonnée et rebelle. Du coup, ses affaires se dégrades et il réalise certains actes bancaires illégaux (il réutilise certaines cartes d’expédition et de paiement de matériaux et escroque de nombreux clients, qui le dénoncent finalement à la police) le contraignent à un « salutaire » éloignement de Turin avec sa nouvelle conquête.
Il devient un aventurier et, accompagné d’une certaine Juliette, il entreprend une activité dans le monde du spectacle itinérant.
Mais le 20 Juin 1919, alors qu’il est assis dans un bar, à Naples, il lit un article dans le « Mattino », quotidien dirigé à l’époque par Scarfoglio, signé par un certain Trevisani. Pour la première fois, la presse est concernée et intéressée par le cas sensationnel d’un frère d’un village obscur et perdu du Gargano, dans les Pouilles.
L’article décrit l’histoire d’un capucin, doux et humble, dont le corps porte les marques et les signes de l’ultime souffrance de Jésus : les stigmates. Il y est aussi question de certains événements miraculeux de guérison, et de l’un d’eux est également témoin direct et oculaire le journaliste lui-même. y
Dans le « Mattino » de Naples – 20 Juin 1919: « Padre Pio, le » saint » de San Giovanni Rotondo, a opéré un miracle sur la personne du Chancelier du pays. Notre envoyé était présent « (…) Il y avait le procureur du Roi du Tribunal de Lucera- le Dott Alessandro Mione, le directeur de la Préfecture de San Severo, le dott Angelo dello Russo, le docteur Antonio Francesco Giuva, le Vice-Prêteur Nicola Siena, le Secrétaire du procureur du Roi- Luigi Travisano- et le Chancelier de la Prêture de San Giovanni Rotondo –Pasquale di Chiara ».
Ce dernier, étant en effet, le « miraculé » en question.
La curiosité est forte, intense et subite et Emanuele crut sans hésité au Padre Pio (Père Pie – Père Pieux selon la double signification italienne) et se mit dès lors à le prier chaque jour.
Au bout de quelques années de cette vie de saltimbanque et n’ayant pratiquement plus rien pour vivre, il décide de se rendre visite à ce moine stigmatisé.
Une rencontre qui va de nouveau changer le cours de sa vie.
Le moment et l’histoire de la conversion d’Emanuele sont bien connus de ceux qui connaissent la vie du Saint Padre Pio, la sienne est de type renversant et total.
De retour après seulement quelques jours, avec plus en sous en poche, mais fort de la bénédiction de Padre Pio, Emanuele se remet au travail et cette fois, il devient représentant d’une grande marque de vins et spiritueux du centre-sud de l’Italie, poursuivant son habituel mode de vie effréné, toutefois assagit et changé.
Les affaires marchant très bien, il décide de retourner à San Giovanni Rotondo pour remercier son bienfaiteur. Il y recevra un premier message personnel du Père : « remercie la Madone ».
Soutenu par sa « bonne étoile », il se lance dans le monde de la haute couture, ouvrant un atelier, faisant venir de Paris deux couturières habiles et qualifiées qui, accompagnées et guidées par Juliette ainsi que par sa première femme (qu’il fait venir de Turin), conduisent et gèrent les affaires et le travail, si bien qu’en 1921 se tient une soirée de haute couture, à laquelle assistent toute la noblesse et la haute bourgeoisie napolitaine. À l’événement mondain sont également présents le roi et la reine d’Italie. Tout se passe à merveille, mais une pensée préoccupe et obsède Emanuele.
Un revirement du destin, dû aussi à la situation impossible créée par la proximité des deux femmes, provoque d’abord le chaos, puis l’échec successif des activités de couture, au mois de septembre de la même année.
Sa femme s’éloigne de Naples et de sa vie, retournant définitivement à Turin et Emanuele, réduit à rien, mais nullement désespéré, procède à la fermeture de ses activités et se met en voyage pour … se rendre au petit pays de Gargano, à San Giovanni Rotondo, où se trouve Padre Pio de Pietrelcina.
Il s’installe d’abord dans les abords du couvent (dans une cabane avec un toit de chaume, habituellement utilisée pour la récolte des olives), puis à l’invitation de celui qui devient son Père spirituel, il occupe la cellule n ° 6, à côté de celle de Padre Pio, la n ° 5.
Pendant six ans, la proximité n’est pas seulement «spatiale» – pour ainsi dire -, mais aussi et surtout émotionnelle et spirituelle : Emanuele change totalement de mode de vie et devient la personne la plus proche du frère stigmatisé, son ombre perpétuelle, son officiant de messe, son assistant, son fils spirituel … et son chien de garde personnel et fidèle!
Padre Pio l’apostrophait avec bienveillance « u-francese » -le français- mais surtout « u poliziotto « – le policier- Emanuele comprendra plus tard, le sens prémonitoire de ces mots.
Pendant ce temps, le 22 Janvier 1922, le pape Benoit XV meurt et Pie XI est élu le 12 février sur le trône de Pierre.
Le 3 Juillet de la même année, Pie XI reçoit en audience privée l ‘archevêque de Manfredonia, Mgr Pasquale Gagliardi et commencent à prendre corps les premières mesures pour restreindre la prêtrise de Padre Pio, qui seront suivies par celles du 31 Mai 1923 (déclaration officielle du Saint-Office), le communiqué de l’ »Osservatore Romano » du 5 Juillet (dans lequel on affirme que les stigmates de Padre Pio ont été jugés «privées des signes du Christ», qu’il y a donc tricherie et / ou phénomène hystérique), et puis encore celles du 24 Juillet 1924 (mise en garde du Saint-Office, signé par le cardinal Merry del Val : «… à partir d’informations provenant de nombreuses sources fiables, il est interdit aux fidèles de maintenir tout type de relation avec le Père Pio »), datée du 23 avril 1926 ( communiqué du Saint-Office concernant le livre « Padre Pio da Pietrelcina » : « … il ne peut pas, sans la permission due, ni être imprimé, ni lu, ni appris, ni vendu, ni traduit dans d’autres langues, ni personne le communiquer à d’autres (…) selon les termes du Canon 1399, 5 ° du Code de droit canonique), du 11 Juillet de la même année (communiqué ultérieur du Saint-Office: » … Une fois de plus, la même Congrégation Sacrée Suprême estime nécessaire de rappeler au souvenir des fidèles ses déclarations antérieures et les instructions relatives au susnommé Père, qui sont publiées dans ce même Bulletin. Vol XV-p. 356 – et vol. XVI-p. 368 – pour que les fidèles sachent qu’il est de leur devoir de s’abstenir de lui rendre visite, ou de maintenir des relations avec lui, même seulement par échanges épistolaires. « ), du 22 Mai 1931 (notification du Saint-Office), avec communiqué suivant de l’ » Osservatore Romano « du 23 Mai de la même année: » … le moine peut dire la Messe uniquement dans une cellule intérieure, « saccello intérieure », privé, pas dans l’église publique ».
D’autres suivront dans les années à venir.
Emanuele assiste donc en direct, attristé et impuissant, aux premières persécutions et aux premières restrictions imposées par la Cour suprême de l’Église, envers son bien aimé père spirituel, qui obéit et se tait avec diligence, comme le lui impose son vœu sacerdotal.
Mais le même vœu d’obéissance ne s’impose pas à Emanuele, qui intervient en personne et fait arrêter le chanoine, Miscio Giovanni (de San Giovanni Rotondo), pour une histoire fourbe et lâche d’un chantage aux dépens de la famille Forgione, et en 1925 il commence à recueillir de la documentation sur les complicités et les malversations à charge de l’archevêque de Manfredonia, Pasquale Gagliardi, de l’Archiprêtre de SG Rotondo (Prencipe Giuseppe) et d’un chanoine du même pays (Domenico Palladino), qui, par leurs lettres et dénonciations anonymes, ont été les premiers persécuteurs et à l’origine de celles qui ont suivi contre le saint frère stigmatisé.
L’ensemble de la documentation a été donné par Emanuele en personne et de manière privée (au cours du mois de Juin 1925 et sur les recommandations expresses de don Orione –Canonisé par SS le Pape Jean Paul II, le 16 mai 2004) à :
Cardinal Pietro Gasparri | Secrétaire de l’État du Vatican |
Raffaele Merry del Val | Secrétaire du Saint-Office |
Cardinal Basilio Pompily | Vicaire de Pie XI ° |
Cardinal Donato Sbarreti | Préfet du Concile |
Gaetano de Lai | Préfet au Consistoire |
Michele Lega | Préfet aux Sacrements |
Van Rossum | Préfet de la Propagande de la Foi |
Augusto Sily | Préfet du Tribunal de la Segnatura |
Ludovico Billot | Supérieur franciscain |
Mgr Carlo Perosi | Assesseur au Saint-Office |
Père Rosa | Directeur de « Citoyenneté catholique » |
Père Tacchi Venturi | Supérieur jésuite |
Le 15 Juillet de la même année, est publié un communiqué du Saint-Office (signé par le cardinal Merry del Val), dans lequel est spécifié l’ordre que: «… Aucun ecclésiastique ou laïc – désormais – ne recevra l’hospitalité dans le monastère ou le collège annexe de San Giovanni Rotondo « , et le 19 du même mois, le père Gaetano Morelli est envoyé « dans un monastère lointain », par l’intermédiaire d’une lettre provenant de la Curie « Generalizia » des Frères Mineurs Capucins (Via Boncompagni 71-Rome-), parce que lent à exécuter cet ordre de la congrégation sacrée, vis-à-vis d’Emanuele.
Pourtant, ses enquêtes précises et ses conclusions (d’où l’appellation « le policier »), parviennent à convaincre et à attirer l’attention du Cardinal Pietro Gasparri comme du Cardinal Felice Bevilacqua, qui inviteront ensuite Emanuele à accepter la charge de certaines « enquêtes à l’égard de quelques chanoines « (documentation des 15 et 19 Décembre 1927), avec le poste d’assistant-visiteur-laïc de monseigneur Bevilacqua.
Le 20 avril 1926, Emanuele publie le livre « Padre Pio da Pietrelcina », sous le pseudonyme de Giuseppe de Rossi (éditions Berlutti, Rome), mis à l’index, trois jours seulement après sa sortie, et la même année, il organise la construction de la maison de Mary Pyle à San Giovanni Rotondo ainsi que du monastère et de l’église de Pietrelcina, que la riche mécène américaine subventionne.
Il voyage sans relâche de SG Rotondo à Rome, de Pietrelcina à Florence, et de nouveau à Bologne, Rome, … et recueille un matériel très important, grâce à ses propres investigations et des sources fiables, parmi lesquelles les Archives du Vatican, auxquelles il a libre accès en vertu de sa charge.
Dans l’intervalle, les mesures restrictives à l’égard de son père spirituel ne diminuent pas … au contraire !
Emanuele perd finalement patience, à la fin de l’année 1927, quand il doit quitter le couvent de SG Rotondo en raison de « fortes pressions supérieures» et que commence à prendre forme l’idée des « pressions » qu’il peut exercer lui-même à l’encontre du monde ecclésiastique, afin que soit restaurée la vérité envers son père spirituel. Il publie à Leipzig -avec l’aide de Francis Morcaldi, maire de SG Rotondo et son ami personnel et fidèle, « Lettre à l’Église» (Leipzig 1929), un dossier explosif de 500 pages.
Emanuele écrit: « .. Il s’agit d’un volume que j’ai fait imprimer par la Spamerske Buchdruck, de 431 pages, avec la reproduction photographique de 281 documents, et signé par mon ami avocat Francis Morcaldi, mais écrit par moi (…) La publication, que j’avais limitée à un millier d’exemplaires, était destinée aux autorités religieuses, les plus importantes de l’Église (…) J’ai fait transporter de Leipzig à Monaco(Munich) de Bavière les mille volumes dans des boîtes fermées confiées à mon ami Giuseppe de Paoli, bijoutier de cette ville (…) Les documents originaux, reproduits ou pas dans le livre, avaient été répartis par moi-même dans un coffre-fort à Monaco, dans une villa de Marie Pyle, et dans un autre lieu à l’étranger. »
Le désarroi de la part des autorités religieuses fut grand et de nombreuses accusations furent lancées de part et d’autre, entre Brunatto et les hautes responsabilités religieuses, et lors de la tenue ensuite des Pactes du Latran (11-02-1929), les rapports entre Emanuele et Mgr Bevilacqua s’interrompirent soudainement et définitivement.
En 1929, Emanuele met en scène et fait jouer son premier drame sacré : «Frère Soleil», au Teatro Adriano de Rome.
À cette époque, Padre Pio est invité (par la Comtesse Augusta Sily) à accepter une part de capital dans une nouvelle SA (donc des actions), mais n’ayant pas le droit de le faire, selon le vœu de pauvreté fait par tout moine franciscain au moment de son entrée dans l’ordre, il se fait représenter par Emanuele dans cette société, créée à partir d’une série de mécanismes novateurs pour le transport par rail, liée aux brevets des inventeurs Fausto Zarlatti et Umberto Simoni.
Parmi les principaux actionnaires de cette société figurait la haute nomenclature fasciste de l’époque, en la personne des contes Vincenzo Baiocchi, Alessandrini, de l’avocat Antonio Angelini Rota, etc ..
De 1929 à 1932, Emanuele est le Directeur général de la Société Anonyme « Zarlatti Locomotive ».
En Aout 1932 il s’installe à Paris.
De 1933 à 1934, il est président de l’Union pour la Construction des locomotives diesel, composée de la Compagnie de « Fives-Lille, la « Société Générale de Constructions Mécaniques « (La Courneuve), de la Société « CAIL» et de la Société « Zarlatti. » De 1935 à 1939, il est également président et directeur général de la « Société Française de locomotives Diesel « , située au 146, Boulevard Haussmann à Paris.
Dans cette période historique, les brevets « Zarlatti-Simoni » résolvent le problème aigu qui affligeait le monde en évolution de la tradition ferroviaire, qui à l’époque utilisait le charbon comme combustible pour alimenter les chaudières à vapeur, qui faisaient bouger les roues des trains d’alors : beaucoup de charbon – beaucoup de fumée – pour un faible rendement mécanique. L’innovante « Locomotive pneumatique Zarlatti-Simoni » résolvait la question de la force motrice par l’utilisation d’un «mélange» d’air comprimé et de pétrole, augmentant considérablement les performances.
L’ingénieur Simoni avait conçu et construit un prototype, et sur le châssis de la locomotive n°910042 des Chemins de fer de l’État fasciste italien, avait installé un moteur «S. Giorgio – Fiat », prélevé sur un ancien, mais toujours actif sous-marin à six sous-cylindres, d’une puissance maximale de 325 HP et 450 tours par minute. Ce moteur était couplé – par le biais d’un joint élastique – à un compresseur rotatif ‘Winterthur R280’ à deux cylindres et avec une pression de 8 atmosphères : c’était une véritable révolution dans le monde en pleine expansion du réseau de transport des chemins de fer, qui remplaçait celui de la vapeur, par un moteur diesel plus puissant et plus fiable. Les premières motrices qui bénéficièrent de ce nouveau système de traction furent appelées « Littorines », et du 15 avril au 15 Novembre 1930 (sur la ligne Rome – Ostie) l’une d’elles effectua plus de 4000 kilomètres de parcours, à titre expérimental, établissant un record exceptionnel.
Pour l’époque … bien sûr.
Emanuele fait gagner un maximum d’argent aux différentes sociétés, qui vendent leurs brevets à de nombreux états européens, et lui aussi gagne beaucoup d’argent. Beaucoup.
Pendant le temps où Emanuele effectue des tournées en Europe pour le travail, le 11 Juillet 1931 est décidé la ségrégation ultérieure de Padre Pio, et en parallèle de hautes autorités religieuses parviennent à convaincre Morcaldi de livrer la totalité du stock de livres (998 exemplaires) et 13 paquets, de clichés et documents divers, au secrétaire de la Nonciature Apostolique de Monaco de Bavière, le 10/10/1931, et dans une deuxième livraison 21 autres enveloppes contenant des documents originaux, à un intermédiaire ecclésiastique, le 19-10-1931.
En échange, les « hautes autorités ecclésiastiques » s’engagent formellement envers Morcaldi à faire retirer les mesures d’empêchement du Saint Office contre Padre Pio.
Ce qui ne fut pas le cas.
Emanuele, revenu en Italie et découvrant tout, déclencha un véritable scandale, apostrophant lourdement l’entourage entier auquel il avait confié le matériel, désormais définitivement perdu.
Annotation de Francis Morcaldi : « … nous sommes en avril 1932. Emanuele est revenu de l’étranger et ayant appris que j’avais tout pris et tout donné. Ce fut la fin du monde. Ceux de SG Rotondo m’appelaient traître et vendu. Je réussis à me défendre en soutenant que le Padre (ndr: Padre Pio) serait rendu libre. Mais quoi ! Je vais chez le cardinal Rossi qui me demande s’il est possible que des copies du livre soient restées à la typographie. Je l’exclus. J’invoque la promesse de libération du Padre … »
En 1932 à Paris, Emanuele décide de poursuivre son combat, en écrivant un nouveau dossier, «Les Anti-Christ dans l’Église du Christ » avec le nom de John Willougby (son autre pseudonyme). En 1933, il en fait imprimer 2000 exemplaires, qu’il tient prêts à être déversés sur le marché de l’édition internationale, choisissant le 16 Juillet comme date de sortie de l’ouvrage, d’un commun accord avec la maison la maison d’édition, ALDANA créée à cet effet.
Alors que dans la « Lettre à l’Église» les noms des personnes impliquées dans le détournement et la calomnie contre Padre Pio étaient cachés, dans l’ouvrage « Les Anti-Christ dans l’Église du Christ, » la dénonciation donne les noms et remonte jusqu’à de très hautes personnalités de l’Église de Rome … jusqu’à l’entourage du trône de Saint-Pierre.
Les persécutions et les restrictions à l’encontre de son père spirituel s’arrêtent soudainement … (p.s. le 14 Juillet 1933 s’achève la ségrégation de Padre Pio) et Emanuele décide de ne pas mettre le dossier sur le marché de l’édition: il retire toutes les copies et ne donne pas suite à la publication, payant une forte pénalité à l’éditeur, conservant pourtant la documentation complète.
Emanuele écrit: « Il n’y a à se plaindre de rien. Tels étaient les termes : je voulais la libération du Père … Et elle est arrivée, j’ai réussi mon objectif. Je supporterai personnellement tous les inconvénients financiers ».
En 1934, il fait la connaissance d’Arlette Champroux (Paris 1917 – Rome 1990) de vingt-cinq ans plus jeune que lui, avec laquelle il se met en ménage. Elle met au monde quatre enfants : Paul (1936), Felicia (1937), Itala Monique (1938-1981) et Franca Maria Pia (1938). Les deux dernières étant jumelles.
De 1935 à 1938, il préside le « Comité pour l’amitié franco-italienne » à Paris, et en 1936, il fonde l’hebdomadaire « Demain », afin de défendre l’idée de l’unité de l’Europe.
Pendant la Deuxième Guerre mondiale (de 1940 à 1944), Emanuele voyage en Europe pour affaires, résidant souvent à Genève, alors que sa famille vit à Quarrata, en Toscane.
Le 9 Janvier 1940, Padre Pio manifeste ouvertement et publiquement son intention de construire l’hôpital « Casa Sollievo della Sofferenza », et le 3 Juin 1941, Emanuele fait parvenir de la capitale française une lettre de crédit aux établissements du Crédit Italien de Florence, de la part de la Banque Italo Française de Crédit (dont le siège est à Paris, Bd des Capucines) soit la somme de 3.500.000 francs pour le « Comité pour la construction de la clinique de San Giovanni Rotondo – Foggia ». Cette première et conséquente donation permet de jeter les bases de la construction de l’hôpital tant désiré par Padre Pio, inauguré le 5/5/1956.
Toujours durant la période de la Seconde Guerre mondiale (1940 à 1944) Emanuele occupe la charge de Délégué officiel des produits français, pour la fourniture à l’armée d’occupation allemande : chocolat, confitures, vins et spiritueux, substituts de thé, café, en outre, il est aussi propriétaire et directeur du studio de cinéma « Fides », pour la production et la diffusion de films à caractère religieux.
De 1941 à 1945, il est le fondateur (et unique bailleur de fonds, dans le plus strict anonymat), de la célèbre « Boisson chaude », activité menée sous l’égide du Préfet de la Seine.
Cette œuvre de bienfaisance distribuait – dans le hall de la gare de Lyon et de la gare Saint Lazare, à Paris – jusqu’à 18.000 rations de nourriture chaude par jour, composées de chocolat chaud, pain, viande et confiture. Ces distributions étaient entièrement gratuites et faites sur simple présentation de cartes, fournies par la ville de Paris, sans discrimination de nationalité, de race ou d’appartenance politique.
De plus, Emanuele subventionna régulièrement – en espèces ou en nature – les instituts suivant, dans le département de la Seine et de la Seine-et-Oise:
Orphelinat d’Aulnay sous Bois;
Sœurs de Sainte Marie Cabrini;
Filles de la Charité de la rue Violet;
Servantes du Sacré-Coeur de Parmain;
Paroisses russes de Saint-Sauveur et Rueil-Malmaison;
Mission de l’Ukraine;
Œuvres paroissiales de Bures sur Yvette;
Séminaire de Versailles;
Bureau de l’action familiale et sociale de Saint-Jean de Montmartre;
Prisonniers de guerre d’Orsay.
Il paya aussi – et de sa propre poche – les pensions des anciens combattants italiens, mutilés et des veuves de guerre en France, soit un versement de 3 millions de francs français, à titre d’avance au gouvernement italien qui, en 1943, n’avait plus de valeur française à Paris.
Cette largesse ne fut jamais restituée, et en 1945 il subventionna par la somme de 700.000 francs «l’Université catholique de Paris>, privé du concours financier du gouvernement.
Cet ultime don – anonyme – fut concédé sous l’égide du Nonce Apostolique de l’époque, Mgr AG Roncalli.
Pendant cette période douloureuse et néfaste, Emanuele se dévoua pour aider lui-même de nombreuses familles d’origine juive et des résistants à l’occupation nazie en France, de 1941 à 1944 :
La famille Soustiel (Juifs grecs : le mari, la femme et les deux enfants) est munie de faux papiers et logée dans la villa d’Emanuele à Orsay (11 chambres et plusieurs hectares de jardin), pendant toute la durée de l’occupation. Irène, la mère et ses enfants n’ont jamais manqué et encore aujourd’hui (2014), de témoigner d’abord à Emanuele puis à sa famille une profonde reconnaissance et une amitié sincère ;
La famille Berfraind (la mère, les trois filles et deux nièces) est abritée dans une dépendance d’une autre villa d’Emanuele (à l’Isle-Adam) et il subvient à ses besoins pendant plusieurs mois, gratuitement. Elle fut envoyée ensuite (aux frais et aux risques d’Emanuele) en zone libre ;
Sabina Kohn et sa mère sont logées dans l’appartement du Bd Haussmann, pendant plusieurs mois, et conduites ensuite en voiture (par le même Emanuele) à la limite de la zone libre, à 300 km de Paris, malgré l’interdiction à toute voiture parisienne de dépasser le périmètre de 50 kilomètres autour de la capitale française: aujourd’hui, certains membres de ces familles juives sont encore vivants, pour lesquelles Emanuele a risqué la déportation quotidiennement, sains et saufs, prêts à témoigner à tout moment, sur simple demande.
De même que les 150 réfractaires au STO (travail obligatoire), qui furent employés à L’Isle-Adam en 1943, pour la collecte des feuilles et des herbes destinées à la production d’un substitut de thé, devenant ainsi exemptés de la déportation certaine.
Le capitaine Chaidron et son épouse (recherchés par la Gestapo) furent logés dans la même villa de l’Isle-Adam, et Aldo Molinari (déserteur italien et résistant depuis 1943) fut employé par contre comme son chauffeur personnel, jusqu’à la fin de l’occupation.
La Supérieure Générale des Filles de la Charité et d’autres religieuses arrêtées par la Gestapo rue du Bac, et transférées ensuite à Metz, ont été libérées sur intervention de Brunatto pour « raisons politiques », après paiement d’une forte rançon, toujours payée par Emanuele.
L’industriel, Antony de Chaumey, condamné à mort pour espionnage en faveur de l’Angleterre, fut gracié à la veille de l’exécution, ainsi que trois de ses compagnons, sur intervention de Brunatto, qui paya personnellement l’opération de sauvetage. Toutes ces opérations de sauvetage purent être accomplies de toute évidence avec la complicité de la police allemande, mais payées à prix fort par Emanuele. Toutefois, l’attention de l’Etat-Major allemand (Majestic) fut éveillée en 1943 et les entreprises de Brunatto passèrent sous l’administration allemande du docteur Loskant, qui lui confisqua biens et argent, gelant ses comptes bancaires. Après quelques mois, n’ayant pas été en mesure de prouver quoi que ce soit contre lui, ses biens lui furent restitués, à l’exception de l’argent retiré du coffre-fort et d’un stock de haute valeur industrielle, d’une valeur de plusieurs millions de francs à l’époque.
En 1942, Emanuele met de nouveau en scène son drame sacré «Frère Soleil», en français, et cette fois au théâtre du Vieux-Colombier à Paris, avec plus de 100 représentations consécutives.
À la fin de cette période troublée et horrible que beaucoup appellent «Deuxième Guerre mondiale», Emanuele fut d’abord condamné à mort, par contumace, avec confiscation de tous ses biens, en raison de son «engagement» dans l’histoire du gouvernement collaborationniste de Vichy (Arrêt de la Cour militaire de Paris, 1947) et, après appel, il fut condamné à 5 ans de prison avec sursis (sentence du 17 Juillet 1951), sentence annulée par la Cour de cassation le 18 avril 1953, lorsque furent connues les preuves de sa collaboration avec l’organisation créée par le Père capucin Benoit, afin de sauver un grand nombre de réfugiés de guerre dans la «zone italienne » en France, avec l’aide précieuse de Angelo Donati.
Angelo Donati, ami intime d’Emanuele, était originaire de Modène et par la suite, il s’installa en France (au début des années 1920) où il fut parmi les fondateurs de la Banque Italo-française, sinon le principal collaborateur du père Benoît, fondateur de DELASEM, organisation qui avait son quartier général dans la Maison provinciale des Capucins de Rome, via Sicilia, et qui aida au sauvetage de milliers de Juifs échappant à l’Holocauste, de Nice vers la côte italienne: la «Via Nizza » a sauvé plus de 16.000 juifs.
Sorti de prison et ses problèmes résolus avec la justice française, Emanuele vit toujours à Paris, et à Genève il fonde l’ « Association pour la défense des œuvres et de la personne de Padre Pio de Pietrelcina ». Au début de 1950, il fonde – sous les auspices de l’habituel Nonce Apostolique de Paris, Mgr AG Roncalli, devenu entre-temps son ami personnel – l’association « Je Crois » pour la recherche et la production de films d’enseignement religieux. Le comité religieux de « Je Crois » a été présidé par Mgr Jean Calvet, recteur de l’Université catholique de Paris et comprenait des représentants officiels des P.P. Capucins, des Jésuites, des Dominicains, et plusieurs représentants français de l’enseignement universitaire laïc.
En 1955, il collabore et finance la publication de « Droit et Justice », journal de la critique juridique, dirigé par l’avocat Giacomo Primo Augenti, avec son siège, via Tacito 64. Il dirige et subventionne la publication de « Franciscus », le magazine de « l’Association des Fondateurs et Oblats de la Casa Sollievo della Sofferenza », dont le siège se trouve à Genève, 16, rue de Roveray, secrétaire madame Sordido, le bureau de Paris, 8, rue Saint-Marc, dans le 2e; le bureau de Rome, Via Nazionale, 243, secrétaire Mlle Emanuela Gomez de Teràn.
Le 24 Juin 1957, il publie « Pourquoi je l’aime », aux éditions « G. Durassiè & C » – Paris-Makaloff, dépôt légal n ° 312. Livre en hommage à Marie, l’Immaculée Conception. C’est une découverte de Marie mère des Hommes, un voyage dans plusieurs Sanctuaires des apparitions de la Sainte Vierge où Emanuele a pu se recueillir.
Il a donc des disponibilités financières considérables et apparaît à tous comme un homme puissant, à qui rien n’est refusé. Il continue à avoir des contacts avec de hauts responsables civils, politiques et religieux, malgré son désir exprimé de Padre Pio, il respecte l’obligation de silence, animé toutefois par son esprit rebelle, qui pourrait faire éclater un énorme scandale.
De 1945 à 1962, il est le fondateur et Président de l’Institut coopératif (Centre d’études et d’action pour la coopération économique), et il organise 3 congrès internationaux et 14 Journées nationales d’information, assurant la publication de 745 bulletins.
Il est encouragé personnellement par Pie XII, 42 cardinaux et évêques, par Mgr AG Roncalli et par d’autres nonces apostoliques, par le président Enrico De Nicola, par Coty et De Gaulle, par plusieurs anciens présidents du Conseil et Ministres de France, par des économistes et des sociologues , y compris les recteurs de certaines grandes Universités américaines, tel Louis Marin (vice-président de « l’Association pour la France » et cinq fois ministre d’État, et Président de l’Académie des Sciences morales et politiques), et par le sénateur Italo Mario Sacco, Président du groupe interparlementaire de la «Coopération internationale».
En 1955, il écrit « Israël, mon premier-né» (publié en France en 2011 sous le titre : Padre Pio mon père spirituel, ed: L’Orme Rond), qui retrace la vie d’Emanuele, sa rencontre avec le Padre Pio et sa vie en Italie jusqu’en 1932.
Après la sale affaire des magnétophones dans la cellule et dans le confessionnal de Padre Pio, il publie en Juin 1963, le «Livre blanc», AID, éditeur, rue de Roveray – Geneve- (dont il reste très peu de copies en circulation, demandant qu’il soit remis à l’arbitrage international de l’ONU) et par ses initiatives personnelles, il soutient et subventionne la campagne de défense en faveur de son bien-aimé père spirituel, retournant les accusations de diffamation et calomnies, démasquant la conjuration qui voudrait seulement s’approprier l’argent, que les œuvres du saint capucin stigmatisé font arriver San Giovanni Rotondo, sous la forme de dons des fidèles.
En outre, Emanuele, à l’âge vénérable de 71 ans, s’unit en mariage selon le rite catholique, avec Andrée Yvonne Nerre, alors âgée de 39 ans, collaboratrice de son amie typographe Madeleine Coulon. La cérémonie religieuse est célébrée dans la cathédrale solennelle de Westminster, à Londres le 26 avril, en présence des témoins communs, en la personne de monsieur Henry M. O’Hagan et monsieur DC O’keeffe. À cette période, ils logent tous les deux à l’Hôtel Eccleston, sur le square homonyme Eccleston Square, SW1.
Le 19 mai, naît leur fils, qui est baptisé avec le nom de François (Francesco- nom de baptême de Padre Pio).
Le matin du 9 février 1965, se doutant de quelque chose, Emanuele téléphone à son ami Luigi Peroni de Rome et le prie de venir le trouver de toute urgence, dans son bureau et appartement de la Via Nazionale. À son arrivée (« …au commendatore, on ne peut dire non… »), Emanuele le prie de prendre tout son matériel, bobines, notes, livres, documents… et de les tenir cachés dans un lieu sûr.
Peroni est littéralement retourné et confondu face à tout ce matériel, si important qu’il aurait fallu une voiture, mais que lui, venant de son bureau, n’a pas. Il demande donc un peu de temps pour tout organiser, au moins une nuit…
Emanuele est retrouvé mort, le matin du 10 février, par la femme de ménage. La police affirme qu’il est mort d’un infarctus, d’autres (parmi lesquels son ami entrepreneur de Padou, Giuseppe Pagnossin), d’empoisonnement à la strychnine.
Il se faisait livrer des plats en provenance d’un restaurant voisin… et d’une simple enquête personnelle –auprès de la Bibliothèque Nationale de Rome- il ressort que la nuit du 9 février 1965… il ne s’est rien passé.
Le Brunatto, à peine mort, les bobines, la documentation, les livres, les manuscrits n’existent plus (le jour de ses funérailles, on fait disparaître tout le mobilier !).
Le siège de Genève n’existe plus, ni celui de Paris, de Rome, ni l’argent, les comptes bancaires.
Rien de rien
Une belle et ensoleillée matinée de février… mais celle-ci est une autre histoire, celle d’Emanuele s’arrête.
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PS : On dit et raconte que si vous vous rendez sur la tombe de quelqu’un que vous avez longtemps cherché, et que vous lui posez une –et une seule- question, il vous répondra peut-être.
Quelqu’un l’a fait… et Emanuele lui a répondu.
Edoardo Misuraca
Bonjour,
j’ai acheté le livre. C’est très impressionnant.
Pour le meurtre d’Emanuele, qui aurait pu faire cela : des « gens » d’Église (de la « paroisse ») ou pour des raisons politiques ?
Cordialement
Fabrice Pélestor
ingénieur atomiste
président du syndicat CFTC/Défense Grand Sud-Est
Monsieur,
Impossible de vous répondre aujourd’hui, cela reste un mystère. Ce qui est certain c’est qu’Emanuele Brunatto avait des ennemies puissants…
Cordialement